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On y reparle de Sherlock, de fait le parallèle entre les deux univers se fait de plus en plus évident. Il serait tentant de lire Burma uniquement en fonction de ses « modèles » (littéraires ou non) afin de mettre en avant ce qui distingue notre détective de choc des Lupin (tout le monde est Lupin, personne n’est Lupin), Maigret (impossible… c’est Faroux) ou Sherlock (pour ce dernier la tâche me paraît plus complexe).

Effectivement, en proposant un texte court, une situation saugrenue (un suicide évident pour tout le monde sans preuve ou mobile apparent), un flic zélé et une famille pas tellement dans le deuil, nous avons droit à de nombreux éléments que l’on retrouve dans les romans d’énigmes. Plutôt que de donner la parole à Burma et à son manque de tabac, les premières lignes s’attachent à nous faire la description du lieu où se rend le détective. On passe de la rue, au pavillon, de sa situation vis-à-vis des autres maisons du quartier, pour toucher à sa porte close, un incipit que l’on pourrait trouver « classique », si très vite un décalage humoristique n’était pas mis en place par l’auteur. Un décalage corrosif qui est courant chez Burma et qui reviendra tout au long de ce court récit, mais que l’on trouve ici un peu plus « anglais » que d’habitude par son aspect fantasque.

L’enquête en elle-même n’est pas très longue, pas très complexe ou très palpitante, néanmoins on l’inspecteur qui s’en tient « au fait rien qu’au fait » ne démord pas de sa vision de choses, là où la famille saura demander son aide au détective quand il s’agira de pouvoir mettre la main sur l’héritage. Derrière une magouille financière et mafieuse, on voit poindre une critique sociale aussi juste qu’acerbe. Acerbe parce qu’il n’est pas question d’épargner des groupes dans ces ouvrages ou de « faire passer un message ». Juste parce qu’aussi vif soit-il ce portrait n’en reste pas moins cohérent, le mauvais fils en échec constant, qui vivote dans l’ombre d’un père qu’il déteste, on le dénonce comme veule ou fourbe, mais plus loin on apprend que son propre père l’avait soupçonné. Il y a dans ce jeu, quelque chose du trouble des relations humaines. A lire que l’introduction est XIXième et que le roman développe un point de vue social, on pourrait se croire dans un roman réaliste, il y a sans doute de cela, mais il s’agit surtout d’amener l’enquête à être crédible en croquant au mieux les travers humains. Point que l’on retrouve souvent dans les policiers anglais. Autre point de comparaison, le fait que Burma base son obstination sur un besoin d’argent, sur le fait de vouloir punir un coupable car il ne croit pas au suicide, mais aussi sur la possibilité de pouvoir énoncer un détail qu’il pense décisif. Construire une théorie ou du moins des soupçons autour d’un détail (qui s’avérera probant vous vous en doutez) que l’on révélera à la fin, voici là encore une façon très anglaise de montrer l’habileté du détective.

Sur la forme narrative et sur la structure cette nouvelle permet de mesurer à la fois les emprunts (ou hommage, ou ce que vous voulez) à un certain fonctionnement du policier, mais également en quoi Burma s’écarte de ce modèle (tout en l’épousant). Personnellement c’est le titre qui m’a permis de rester entre ces deux eaux. Parce qu’il propose un humour noir et qu’il renvoie également à un poème de Malet (le soliloque du pendu) et à une figure poétique assez récurrente, de là on voit que le ton va être moins formel qu’on pourrait le penser à la lecture des premières lignes.